XVII Dimanche Mt 13, 44-52
Les trois paraboles que Jésus nous propose dans l’Evangile de ce dimanche, sont les plus brèves de toutes les paraboles évangéliques. Elles nous disent en quelques lignes la manière dont nous sommes invités à nous approprier le Royaume des Cieux.
Or, on ne s’approprie délibérément que ce qu’on désire ardemment ! Eh bien, pour susciter en nous ce désir, Jésus nous parle d’abord d’un « trésor ».
Voilà une parole magique qui retient spontanément notre attention! C’était également ainsi à l’époque de Jésus. En effet, beaucoup de contes orientaux sont structurés autour de la recherche d’un trésor fabuleux.
Souvenons-nous de la caverne d’Ali Baba qui nous a tous fait rêver ! Pas besoin de longs discours : quelques paroles suffisent pour solliciter notre imaginaire. C’est pareil dans les paraboles que nous venons d’entendre :
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Au cours de son travail, un ouvrier agricole découvre un « trésor caché » ;
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Un chercheur des perles fines, en trouve une, de grande valeur.
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Un marin remplit son filet de toutes sortes de poissons.
Et remarquez que tous ces trésors sont accessibles au cœur de leur quotidien. En effet, ces hommes ne faisaient rien d’extraordinaire ; ils s’appliquaient à leur devoir d’état. Oui, le trésor est offert, comme un don gratuit, à quiconque s’applique à son devoir. Le Royaume ne se cache pas au loin dans un lieu sacré ; il ne se confond pas avec des expériences surnaturelles extraordinaires. Il est là, caché au fond de la vie quotidienne : famille, profession, maison, loisirs, amis, école…
Il me plaît dans ce contexte de citer une de plus belles sentences de Jean de La Fontaine : Travaillez, creusez, prenez de la peine : un trésor est caché dedans.
Oui, ces paraboles nous enseignent que la véritable sagesse consiste à ne pas s’arrêter aux choses qui nous entourent, mais à discerner la présence cachée de Celui qui nous fait signe à travers ces choses-là.
C’est bien ce que l’Esprit avait fait comprendre au jeune Salomon (la première lecture de ce dimanche), lui inspirant de demander « non pas de longs jours, ni la richesse, ni la mort de ses ennemis, mais l’art de gouverner sa vie selon le dessein de Dieu.
En effet, le véritable disciple de Jésus est celui ou celle qui demande à Dieu «de lui donner un cœur intelligent et sage» ; un cœur qui sait « tirer de son trésor du neuf et de l’ancien », c’est-à-dire un cœur qui est capable de découvrir ce qui est bon dans le passé, tout en ayant le courage de mettre de côté ce qui ne sert plus!
Un bon exemple où ce processus de discernement est nécessaire, est lorsque nous déménageons d’une maison à une autre. Nous devons alors décider ce qui doit être conservé et ce qui doit être mis de côté. Il ne s’agit pas de tout prendre avec nous ou de tout envoyer à la poubelle. Il faut trier avec discernement.
Il y a quelques mois, j’ai lu le dernier livre d’un jésuite belge le Père Charles Delhez, intitulé : Eglise catholique. Renaître ou disparaître. « Nous assistons aujourd’hui à la disparition de la matrice catholique de la société occidentale et du modèle paroissial de la catholicité » – constate l’auteur de ce livre. En effet, autrefois chaque étape de la vie était encadrée par la paroisse, et quasi chaque association avait son aumônier. L’Église dictait les valeurs, soutenait les arts, organisait les universités et offrait un sens à la vie par sa spiritualité. Notre société était chrétienne. Or, ce n’est pas le cas aujourd’hui.
Pour renaître, à la fois en rupture et en continuité, l’Église de demain doit pouvoir s’appuyer sur celle d’aujourd’hui et celle d’hier. Oui, il ne s’agit pas de tout jeter par-dessus bord, mais – comme le dit joliment Jésus – « tirer de son trésor du neuf et de l’ancien ».
« Avez-vous compris tout cela ? » demande Jésus tout en jetant un regard circulaire insistant sur ceux qui l’entourent, c’est-à-dire sur chacun d’entre nous. « Oui », lui a-t-on répondu. Si c’est bien aussi notre cas, cette compréhension devrait se vérifier dans notre vie, chers frères et sœurs, car « comprendre » (cum-prehendere), c’est avoir en soi l’espace disponible, afin de prendre avec soi ; prendre en soi.
Chers frères et sœurs, toutes les paraboles que Jésus nous raconte dans les évangiles ne deviendront efficaces qu’à partir du moment où nous y voyons notre vie, car la parabole est une image devant laquelle nous sommes toujours appelés à prendre une position. Voilà pourquoi, on ne devient disciple que lorsqu’on apprend à discerner et à choisir de quel côté nous voulons être ! En effet, nous pouvons connaître les normes, les préceptes, les règles, mais sans posséder la sagesse nécessaire pour les appliquer aux situations de la vie, car cette sagesse est un don de Dieu, et non une compétence personnelle. N’oublions pas que Salomon a obtenu un cœur attentif et sage par la prière!
Père Stanislas